Rappel : Pauline, membre de Boucles de la Marne, s’offre des vacances à Totnes (UK), ville chère au cœur de toutes les personnes attirées par la transition écologique. Elle nous explique comment concilier voyage-plaisir et souci de l’environnement avec un objectif : le presque Zéro déchet. Dans un précédent article, elle nous expliquait comment faire ses valises avec pour objectif le zéro déchet, y compris lors du trajet.
#2 L’ARRIVEE
Après près de 7 heures de train, me voilà à Totnes, petite ville paisible du Sud de l’Angleterre, qui m’accueille avec les honneurs d’usage (= la pluie).
Totnes pour les nuls : 8000 âmes environ, capitale emblématique de la transition écologique, visant par une foultitude de projets l’autonomie alimentaire et énergétique. A adopté sa monnaie locale complémentaire, le Totnes pound (existant aussi en monnaie électronique).
Pour plus d’info : le documentaire Demain consacre de longs passages à Totnes et Rob Hopkins, chef de file de Totnes en transition.
Ou https://www.transitiontowntotnes.org/
Direction la maison de mon hôte, Colin, propriétaire d’une maison dont il loue une chambre sur AirBnB. AirBnB fait du dégât dans les agglos touristiques, mais dormir chez l’habitant, dans un logement entier ou une chambre, reste à mon sens le meilleur moyen d’éviter de produire trop de déchets dans la mesure où l’on a accès à une cuisine. De ce point de vue, à moins de viser les labels environnementaux dans l’hôtellerie (dont j’ai pu constater qu’ils étaient au mieux passables), les chambres d’hôtels classiques sont plus problématiques.
Colin’s place et le Zéro déchet ?
Un jeu d’enfant, ou presque. Le district permet la collecte séparée des restes alimentaires pour en faire du compost. Alors, coup de bol ?
Oui et non. En allant dans un coin réputé pour son engagement écologique, j’aurais été fort surprise de ne trouver aucun moyen de composter facilement mes épluchures/restes. Du reste, en réservant mon logement, j’ai également pu apercevoir des photos du charmant jardin potager de mon hôte.
Potager = compost dans l’immense majorité des cas (bon, il se trouve que Colin ne composte pas la nourriture en extérieur pour ne pas attirer les rats).
Conclusion : voyager zéro déchet, c’est plus facile en logeant chez l’habitant/en louant un appart, et en se renseignant sur la politique de gestion des déchets du coin (lorsqu’on est sensible à l’environnement, la question n’est pas plus saugrenue que de savoir si les commerces sont accessibles à pied ou si les restaus offrent des alternatives végé).
Colin et sa petite famille sont également vegan(ish). Le jeune fiston est assez strict sur son régime alimentaire, les parents sont des végétariens qui ne consomment pas de produits laitiers mais ne refusent pas du poisson une fois le mois.
Le bon côté, c’est qu’une alimentation végétale est probablement la plus sobre en ressources, et que je m’évite des discussions pénibles sur mon régime alimentaire.
Le mauvais point, et c’est un problème auquel on est vite confronté lorsqu’on réduit/supprime les produits animaliers, c’est que le marché de l’alimentation végétarienne et a fortiori végétalienne se construit encore à l’heure actuelle sur un tas de produits suremballés.
Premières courses pour mes repas à Totnes (à la boutique bio Sacks) : des patates douces (achetées avec mon sac en tissu, qui a déconcerté le vendeur) et du tempeh* mariné, hors de prix plutôt onéreux , produit localement et emballé dans un fin film plastique qui finira dans mon bocal de non-recyclable.
*Le tempeh, c’est un pain de haricots de soja fermentés et agglomérés grâce à un champignon. C’est une spécialité indonésienne, plus subtile en goût que le tofu, avec une texture très intéressante, à frire notamment.
Addition : 5£
Ce tempeh, c’était une connerie ?
Non. Allez, peut-être un peu oui.
J’ai craqué. Je l’ai vu, et j’ai de suite salivé en pensant à la France, pays si triste qu’il ne propose que deux références de tempeh en magasin bio et où 85% de mes connaissances considèrent ce mets avec dégoût.
Aurais-je pu faire autrement ? Le tempeh en vrac, c’est niet. D’ailleurs, ce sera l’objet d’un prochain article, mais l’Angleterre semble mériter un zéro pointé pour la vente en vrac. Totnes déborde de magasins bios de la taille d’honnêtes Biocoop et aucun distributeur vrac à l’horizon pour les céréales, les légumineuses et les oléagineux.
La solution de facilité pour être vegan sans produire personnellement de déchets ? Consommer les produits simili-carnés à l’extérieur, au pub, au deli, et réserver pour la maison les repas 100% légumes et fruits avec du pain (et du fromage acheté à la coupe/des œufs pour les végétariens). Tout en étant conscient qu’on parle ici de déchets visibles. Consommer un plat dans un restaurant génère des déchets dont vous n’avez pas connaissance, mais on peut estimer que c’est un moindre mal, parce qu’on consomme moins de simili-carnés emballés. Mais il est très rare que des restaus servent du tempeh.
Mon premier repas à Totnes
Pour fêter mon arrivée, j’ai dîné à l’extérieur, dans un fort sympathique pub de Totnes, le William IV.
Dîner : une pinte de bière (obviously!) + un délicieux burger vegan (steak végé composé de pois chiche, potimarron, lentilles, oignons, une tuerie) avec frites.
Bilan déchet : presque le sans-faute, dans la mesure où je n’ai évidemment pas laissé une seule goutte de bière dans mon verre, mais surtout parce que le burger était servi sur une planche en bois (c’est plus cool que les assiettes, me demandez pas pourquoi) avec les frites sur la planche, et les condiments dans des bouteilles. Bonus, les serviettes en papier étaient à part dans un distributeur, donc j’étais peinarde avec ma serviette en tissu.
Je déplore juste que le burger ait été servi avec un piquot en bois assez inutile comme celui de la photo (tout le monde l’enlève non ?) et SURTOUT que ledit burger ait été posé sur la planche avec une serviette en papier dessous. Mais pour quoi faire ?
Alors attention hein, rien de dramatique, c’est même franchement négligeable quand on pense qu’un burger-frites peut-être servi avec les frites dans un gobelet en papier et des sauces en portions individuelles.
Mais ça nous montre à quel point certains gestes inoffensifs, auxquels on ne pense pas, peuvent s’avérer dans la restauration complètement inutiles.
CONCLUSIONS et QUESTIONS
Je vais sur un lieu de vacances où je ne peux pas composter, c’est mort ?
Non ! Avoir un composteur individuel ou un service de collecte des restes alimentaires est loin d’être la norme.
Faites d’abord le tour de vos options : y a-t-il des points de compostages collectifs autour de vous ? Paris s’y met gentiment, preuve que les choses évoluent.
Repérez dans le quartier si un voisin a la place de faire un potager, il a très probablement un compost. Pourquoi ne pas lui demander si vous pouvez déposez vos restes alimentaires. Oui c’est étrange, non ce n’est pas dans nos habitudes, mais oui ça peut être très drôle, surtout avec la barrière de la langue et/ou si celui du groupe/couple qui ose faire sa demande gagne un repas/un verre. Il ne s’agit pas de se comporter en sauvage et de sonner chez quelqu’un en demandant « coucou, je peux jeter mes épluchures d’oignon chez toi ? » mais d’engager la conversation sur le sujet si l’occasion se présente lorsqu’on découvre le voisinage. Un jardinier ne s’émouvra jamais d’une discussion compost et environnement.
Ultime option, testée et approuvée : l’enfouissement : profitez d’une balade en forêt ou dans un coin de nature pour enterrer discrètement à 20 cm de profondeurs vos déchets de cuisine – une excellente occasion d’exploiter ses enfants qui creuseront (ravis) les cavités. Et la solution idéale pour le camping.
A suivre : consommer sans déchet à Totnes et dans les environs (et peut-être une photo du Dartmoor si vous êtes sages).
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